En France, le contrat d’agence commerciale est fortement encadré, notamment par la loi 91-593 du 25 juin 1991 qui résulte de la transposition de la Directive européenne d’harmonisation n°86/653/CEE du 18 décembre 1986, très favorable à l’agent.
Ainsi, comme c’est généralement le cas dans les autres pays européens, l’agent commercial, considéré comme la partie du contrat la plus faible économiquement, bénéficie d’une véritable protection statutaire consacrée par les articles L.134-1 à L.134-17 du Code de commerce.
De par ces dispositions, l’agent commercial jouit d’un statut qui lui est particulièrement favorable en ce qui concerne les conditions de résiliation du contrat d’agence (délai de préavis et indemnité de clientèle).
La durée du préavis
En droit français, les parties ayant conclu un contrat d’agence commerciale pour une durée indéterminée, sont libre de s’en libérer moyennant un préavis obligatoire.
Aussi, selon l’article L 134-11 du Code de commerce, la durée du préavis est de :
- 1 mois pour la première année du contrat ;
- 2 mois pour la 2ème année du contrat ;
- 3 mois pour la 3ème année commencée et les suivantes.
En l’absence de convention contraire, la fin du délai de préavis coïncide avec la fin du mois civil.
Les parties ne peuvent convenir d’un délai de préavis plus courts, toute clause contraire étant réputée non écrite. En revanche, il est permis aux parties de convenir d’un délai plus long, à la condition que le délai de préavis prévu pour le mandant ne soit pas plus court que celui qui est prévu pour l’agent.
Pa railleurs, ces dispositions ne s’appliquent pas lorsque le contrat prend fin en raison d’une faute grave de l’une des parties ou de la survenance d’un cas de force majeure.
Naturellement, le contrat d’agence peut également être conclu à durée déterminée. Cependant, si l’exécution du contrat se poursuit après son terme, il est réputé transformé en un contrat à durée indéterminée, avec pour conséquence que la résiliation à l’issue du terme est soumise à l’obligation du préavis.
Il convient donc d’être vigilant à l’égard de telles situations et de prévoir dans le contrat, le cas échéant, des périodes de reconduction pour une période limitée.
Enfin, il est à noter qu’en vertu du principe de spécialité, les parties à un contrat d’agence commerciale ne sauraient se prévaloir des dispositions applicables à la rupture des relations commerciales établies, prévues à l’article L.442-6-I.5° du Code de commerce, qui permettent de sanctionner toute rupture brutale réalisée sans préavis écrit d’une durée suffisante.
Par conséquent, la durée du préavis à respecter en cas de rupture de la relation d’agence commerciale à l’initiative du mandant s’apprécie uniquement au regarde de l’article L 134-11 du Code du commerce.
L’indemnité de clientèle de l’agent commercial
Au préalable, il convient de préciser qu’en vertu de la directive du Conseil n°86/653 du 18 décembre 1986 précitée, les Etats membres avaient la faculté de choisir entre deux régimes d’indemnisation.
La première option, d’inspiration allemande, prévue à l’article 17.2, prévoit une indemnité pour apport de clientèle ne pouvant excéder une année de rémunération calculée sur la moyenne des 5 dernière années (ou si la contrat n’a pas duré 5 ans, sur la moyenne de la durée du contrat).
La seconde option, d’inspiration française, prévoit à l’article 17.3 la répartition du préjudice de l’agent commercial écoulant de la cession de ses relations avec les commettant. Cette réparation n’est pas conditionnée et l’indemnité qui en découle n’est assujettie dans la directive à aucune limitation quant à son montant.
La France a opté pour le principe de la réparation du préjudice, en reprenant les termes du décret du 23 décembre 1958 dans la loi de transposition de 1991.
Aussi, l’article L. 134-12 alinéa 1 du Code de commerce énonce qu' »en cas ce cessation de ses relations avec la mandant, l’agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi ».
Cette indemnité compensatrice de cessation de contrat est due à l’agent commercial, sans que ce dernier n’ait à justifier d’une quelconque faute de la part du commettant, quelle que soit la durée de la relation et que le contrat ait été conclu pour une durée indéterminée ou déterminée.
Ainsi, elle est due y compris en cas de non-renouvellement du contrat conclu pour une durée déterminée.
L’indemnisation est également due à l’agent commercial s’il met fin lui-même au contrat par suite de fautes commises par le mandant ou pour des raisons dues à l’âge, l’infirmité ou la maladie qui ne lui permettent plus de poursuivre son activité.
En outre, cette compensation bénéficie aux ayants-droit de l’agent commercial lorsque la cessation du contrat est due au décès de l’agent.
En pratique, les tribunaux fixent de manière constante le montant de l’indemnité à l’équivalent de 2 années de commissions brutes calculées sur la moyenne des deux ou trois dernières années, sans que l’argent ait à établir qu’il a procuré de nouveaux marché ou accru le chiffre d’affaires du mandant.
Toutefois, le droit à l’indemnité de fin de contrat est assorti de certaines conditions :
- Le contrat doit répondre à la définition de contrat d’agent commercial. Par exemple, un contrat cadre de coopération et d’intérêt commun qui emprunterait certains dispositifs de statut d’agent commerciale, ne saurait être qualifié comme tel s’il ne comporte aucun mandat de négociation. La qualité de professionnel indépendant, le commissionnement et la délimitation territoriale de la prospection ne constituent pas des caractéristiques suffisantes pour que le contrat soit qualifié de contrat d’agent commercial ;
- L’agent commercial (ou ses ayants-droits) doit notifier au mandat, dans le délai d’un an à compter de la date de cessation du contrat, son intention de faire valoir son droit de réparation, sous peine de perdre le bénéfice de l’indemnité de rupture (art L 134-12 C. com.) ;
- La cessation du contrat ne doit pas avoir été provoquée par la faute grave de l’agent commercial (note : Selon les tribunaux, est notamment constitutif d’une faute grave le fait pour l’agent commercial d’avoir concurrencé le mandat pendant l’exécution de sa mission, au titre du manquement au devoir de loyauté. En revanche, l’absence de réalisation des objectifs commerciaux n’est pas retenue comme une faute grave) et ne doit pas résulter de son initiative (art L 134-13 C. com) ;
- Aucun accord ne doir avoir été conclu entre le mandat et l’agent commercial et ce dernier ne doit pas avoir cédé ses droits et obligations au titre du contrat (art L 134-13 C. com.).
Par ailleurs, il n’est pas exclu que la brièveté des relations contractuelles ne soit pas exceptionnellement prise en compte pour minorer ou ajuster l’indemnité compensatrice à un montant moindre.
On peut également penser qu’un tel ajustement puisse se justifier dans le cas où par la suite de la cessation de la relation commerciale visée, l’agent commercial aurait rapidement retrouvé une activité semblable.
Néanmoins, si ces conditions sont observées, le droit à l’indemnité de l’agent commercial et de ses ayants-droits est d’ordre public et a vocation à s’appliquer en dépit de toutes prévisions contraires des parties.
En application de l’article L 134-16 du Code du commerce, toute clause ou convention contraire est réputée non écrite.
Il en résulte que les parties ne sauraient prévoir dans leur contrat d’agence commercial :
- une clause limitant le montant de l’indemnité de l’agent commercial ;
- une clause stipulant qu’un comportement déterminé de l’agent commercial constituera une faute grave (par exemple, le non atteinte d’une chiffre d’affaires minimum) ;
- une clause incluant l’indemnité de fin de contrat dans le montant des commissions versées à l’agent commercial.
Les dispositions concernant l’indemnité de l’agent commercial constituent en France des lois de police qui prévalent sur toute dispositions contractuelle contraire.
A cet égard, cette règle vient également d’être rappelée au sein de l’Union par la Cour de justice de l’Union Européenne dans un arrêt du 17 octobre 2013.
Les règles « impératives » prévues par des lois nationales, ou « lois de police », prévalent, quelle que soit la loi applicable au contrat.