Opter pour le bon contrat de mariage est impératif pour l’entrepreneur qui veut protéger son conjoint.

Ne pas mêler son conjoint aux éventuelles difficultés de son entreprise est une préoccupation des dirigeants. «Le sujet est souvent abordé par ces derniers quand ils lancent leur affaire, changent le statut de leur société ou à l’occasion d’une redistribution de l’actionnariat au sein de l’entreprise», indique Nathalie Vincent, dirigeant de la société de coaching OpenMind.

Lorsqu’un entrepreneur se marie sans contrat, le régime qui s’applique d’office est celui de la communauté réduite aux acquêts. Les revenus et salaires de l’un profitent à l’autre, les époux bénéficient de l’accroissement de richesse de la communauté et ils conservent la propriété et la gestion de leurs biens propres. «En cas de biens ou de sommes appartenant à l’un des deux conjoints avant leur mariage, il convient d’organiser la traçabilité de l’affectation, notamment s’ils sont employés dans le capital de l’entreprise», souligne Sandrine Colas-Jacomme, associée chez Cyrus Conseil. À noter que ces règles de communauté peuvent nuire au conjoint ou à l’entreprise pour différentes raisons. D’abord, la loi requiert le consentement du conjoint à l’occasion de ventes de parts sociales ou de la constitution d’hypothèques. En cas de conflits familiaux, il existe des risques de blocage dans les décisions relatives à la société. En cas de divorce, il n’est pas facile pour l’entrepreneur d’acheter à son futur «ex» la moitié des parts de l’entreprise.

La séparation de biens est le régime le plus protecteur

Le régime le plus protecteur pour le chef d’entreprise et son conjoint est celui de la séparation de biens. Les époux conservent l’administration et la jouissance des biens qui leur sont personnels (comme l’entreprise). Les créanciers professionnels ne pourront agir que contre les biens personnels de l’entrepreneur et pas contre ceux détenus par son conjoint. «Ce régime est efficace, car il permet d’isoler les actifs professionnels des actifs personnels», explique Grégoire Salignon, responsable de l’ingénierie patrimoniale chez Rothschild Patrimoine. «Ce régime convient notamment aux entrepreneurs individuels, aux professions libérales, à un couple dans lequel chacun des conjoints possède des biens personnels et aux familles recomposées», ajoute Sandrine Colas-Jacomme. Autre type de contrat à envisager: celui dit de la participation aux acquêts. «Ce contrat fonctionne comme un régime séparatiste pendant le mariage et se convertit en régime communautaire en cas de décès ou de divorce», résume Michel Brillat, directeur de l’ingénierie patrimoniale chez CGP Entrepreneurs. En cas de séparation avec enrichissement plus important de l’un par rapport à l’autre, le partage du gain s’effectue à parts égales. Pour justement éviter cette répartition, le régime de participation aux acquêts peut sur demande être strictement limité aux biens privés, avec une clause d’exclusion des biens professionnels.

Reste que le meilleur régime matrimonial n’est pas immuable, mais évolutif. À chaque grande étape de sa vie personnelle (mariage, divorce, remariage) et professionnelle, il faut se poser la question de la qualité de la protection du régime matrimonial en cours. Selon que le chef d’entreprise vient de créer son affaire, la développe depuis plusieurs années avec plus ou moins de succès ou s’apprête à la céder, la valeur de l’outil de travail influe plus ou moins sensiblement sur son patrimoine. Pour opter pour un nouveau contrat de mariage, il faut respecter un délai de deux ans après l’union ou entre deux changements. Réalisée par un notaire, cette procédure n’est pas complexe, toutefois elle prend du temps. Le scénario le plus long peut durer douze à dix-huit mois. Il concerne notamment les couples dont les enfants sont mineurs. Le notaire doit attendre l’homologation de la demande par le juge des affaires familiales. Lorsque les enfants sont majeurs, ce délai est réduit à trois mois.